Moi, c’est Justin, et ma spécialité, c’est le pépin. Comme je suis devenu le roi des pratiques à ne pas suivre, la MAF m’a demandé de vous raconter mes expériences. Vous l’avez redouté ? Moi, je l’ai fait. D’ailleurs, il faut que je vous raconte…
Justin Pépin et la réception de travaux

Ah, la fin des travaux. Quelle fête ! On y convie tous les intervenants pour y constater le parfait achèvement d’un projet qui aura bien occupé tout le monde.

Ainsi lorsque l’opération de construction touche à sa fin, je suggère au maître d’ouvrage d’organiser la réception des travaux avec les entreprises. Sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception, les faire-part sont envoyés pour les convier à la cérémonie de réception qui actera le point de départ des garanties légales que sont le parfait achèvement, le bon fonctionnement et la décennale. Autant le dire : une bamboche qui n’est pas sans conséquences.

Toutes font le déplacement. Toutes ? Que dis-je : l’entreprise de gros oeuvre fait faux bond et ne se présente pas.

Pas de son, pas d’image. Tout l’inverse de mon maître d’ouvrage qui trépigne d’impatience d’en finir avec les travaux pour passer à l’exploitation du bâtiment. C’est décidé : le procès verbal de réception sera établi pour le lot gros oeuvre et signé par le seul maître d’ouvrage qui n’aura d’autre choix que de constater l’absence de l’entreprise aux opérations de réception. Sans désordre, cette absence n’est préjudiciable à personne.

Sauf que je n’ai pas de Pépin que le nom : je cultive plutôt l’habitude de les rencontrer sur mes projets.

Quelque temps après l’euphorie de la réception se dessinent les tourments et, dans leur sillon, les silhouettes des experts. Leur constat est sans appel et le proverbe bien connu : les absents ont toujours tort. La responsabilité de l’entreprise de gros oeuvre est mise en cause.

Fort de ma petite expérience en la matière, je vois rapidement l’écueil arriver. Plaidant que son adhérent n’est en aucun cas signataire du procès-verbal de réception, l’assureur de l’entreprise en charge du gros oeuvre dénie sa garantie, ne permettant pas la mobilisation de la garantie décennale.

J’hyperventile, car je sais qu’il faudra bien trouver un coupable solvable... comme, par hasard, le concepteur.

Je fouille dans mes dossiers pour trouver le seul document qui peut me sauver : le récépissé de réception de la convocation par courrier recommandé à l’entreprise dûment envoyée par mes soins.

La preuve est faite. L’honneur est sauf. Les garanties s’activent.

Il s’en est fallu de peu pour que je goûte à nouveau aux pépins…

 

Réception de travaux : adoptez les gestes qui sauvent

 

  • Convoquer les entreprises à la visite de réception par lettre recommandée avec accusé de réception. En cas de liquidation de l’entreprise, convoquer le mandataire ou le liquidateur judiciaire.
  • Un PV signé par le seul maître de l’ouvrage et l’architecte ne vaut pas réception. Cependant, l’absence de l’entreprise (dûment convoquée) aux opérations de réception ne saurait priver le PV de réception de son caractère contradictoire (Cass 03/06/15).
  • Rédiger systématiquement un PV de réception à proposer au maître d’ouvrage, pour l’ensemble des ouvrages réalisés, et mentionner, le cas échéant, des réserves précises portant sur :
    • Les désordres apparents à la réception.
    • Les désordres signalés sur les PV de chantier.
    • Les épreuves restant à réaliser ultérieurement.

L’ensemble de ces réserves devra être levé pour pouvoir engager la responsabilité décennale des entreprises en cas de désordres ultérieurs sur ces travaux réservés.

  • Conserver une copie du PV de réception signé qui sera nécessaire en cas de désordres pour mobiliser les garanties des assureurs Dommages-ouvrage et de responsabilité décennale des entreprises.

 

Les mésaventures de Justin Pépin sont tirées de faits réels rencontrés dans les dossiers "sinistres" de la MAF.