La MAF revient cette semaine sur l’actualité des architectes. Au programme : le premier prix du RMA, la vision de l’urbanisme de demain selon Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin, les premiers pas du projet CAP 2030 et des changements à prévoir dans les achats publics durables.
L’actualité des concepteurs : Architectes n° 4

Le premier prix du RMA

La première édition du prix du Réseau des Maisons de l’Architecture (RMA) a été remportée par le projet « Breil, cœur de quartier au féminin » (Nantes). L’association Aléas, à l’origine de l’idée, a développé, en collaboration avec divers partenaires, le mobilier urbain « 127 degrés ». Le jury a salué cet exemple éloquent d’inclusion et d’engagement dans la ville.

Ce prix récompense, tous les deux ans, une action réalisée qui rappelle l'importance du rôle que joue l'architecture dans la construction de notre société actuelle et à venir.

Le jury 2023 était co-présidé par Anne-Sophie Kehr, présidente du RMA, et Guy Tapie, sociologue. Ils en ont profité pour rappeler la philosophie de ce prix : inspirer de nouvelles attitudes et valoriser ceux qui contribuent à l’évolution des pratiques architecturales et urbaines.

Repenser l’urbanisme avec Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin

Dans le cadre de leur ouvrage « Faire du PLU un projet de territoire durable » (Éditions le Moniteur, septembre 2023), Catherine Charlot-Valdieu et Philippe Outrequin, économistes et consultants en développement durable, partagent leurs visions sur l’urbanisme durable et les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU). Ils insistent sur la nécessité de repenser les modèles de maisons individuelles, pour favoriser des constructions plus mitoyennes et denses pour contrer l’étalement urbain et préserver les espaces naturels. 

Les PLU, bien que souvent ambitieux dans leurs intentions, peinent à concrétiser ces visions dans leurs orientations d’aménagement. Les deux auteurs mettent en évidence un conflit entre la préservation des territoires et le modèle traditionnel de lotissement, plaidant pour des alternatives plus durables. Ils préconisent une densification réfléchie des villes, en citant l’exemple de la démarche Bimby ou « build in my backyard » (construire dans mon jardin) pour une densification douce.

Ils mettent l’accent également l’accent sur le rôle que doit jouer le PLU face à l’urgence de l’adaptation au changement climatique. Ils préconisent par exemple de promouvoir l’isolation thermique par l’extérieur des bâtiments pour une ville décarbonée, ce qui suggère des dérogations aux règles d’urbanisme pour faciliter cette approche. Pour eux, la clé de l’acceptabilité de ces changements résidera dans la co-construction des PLU avec les habitants, en équilibrant les intérêts privés et l’intérêt général.

Le CAP 2030 au 10ème Congrès National du Bâtiment Durable

La 10ème édition du Congrès national Bâtiment durable s’est tenue à Montpellier les 5 et 6 décembre. Il marque un tournant dans la préparation du cadre réglementaire post-RE2020 avec le lancement du projet CAP 2030. Ce projet, encadré par le Groupement d’Intérêt Écologique (GIE) qui réunit Alliance HQE-GBC et le Collectif Démarches Quartiers Bâtiments Durables et Effinergie, a mobilisé plus de mille participants pour travailler sur divers thèmes environnementaux. Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable, y a souligné l’objectif de construire un socle commun pour le développement ou l’amélioration d’un label environnemental.

Les groupes de travail ont étudié de nombreux sujets, dont :

  • L’économie circulaire, avec un accent sur le réemploi des matériaux. En est ressorti l’intérêt d’établir des indicateurs pour la circularité et la démontabilité des bâtiments.
  • L’efficacité énergétique et le concept de bâtiments à énergie positive (Bepos), pour chercher à définir des normes claires et réalisables.
  • Le low-tech, avec une vision transverse pour intégrer ce sujet dans d’autres groupes de travail, notamment ceux dédiés au carbone, à l’économie circulaire et à l’adaptation au changement climatique.

Un accent particulier est mis sur l’analyse du carbone, en cherchant des méthodes moins complexes pour évaluer l’impact carbone des matériaux de construction dès les phases initiales de conception.

Achat public et durabilité | Ce qui change pour les acheteurs

L’Union européenne renforce les normes d’achats durables, ce qui touche les acheteurs publics en France. Deux conférences récentes ont présenté les réformes en cours et la création d’un kit d’achat durable pour naviguer dans les textes et obligations actuels.

Des changements réglementaires sont attendus avant la fin de l’année 2023, en lien avec la loi sur l’Industrie verte et le secteur de l’énergie. Parmi eux, la transposition de la directive européenne CSRD, qui exige des rapports de durabilité de certaines entreprises. Le non-respect de cette obligation pourrait entraîner une interdiction de soumissionner aux contrats publics. Les autres modifications concernent les achats publics, avec des ajustements mineurs, mais non sans impact, comme l’exclusion en cas d’intérêt de la défense nationale.

L’UE planifie également de nouvelles mesures afin d’intégrer le développement durable dans les marchés publics, comme un règlement sur l’écoconception pour définir des critères obligatoires et des objectifs contraignants. La discussion en cours pourrait clarifier la situation des produits de construction. Parallèlement, le projet de directive « Green claims » cherche à combattre le greenwashing en introduisant un nouveau motif d’exclusion pour les entreprises coupables.

Le règlement « Zéro émission nette », similaire à la loi française sur l’Industrie verte, envisage d’encourager la production de technologies écoresponsables (batteries, pompes à chaleur…). L’idée est d’imposer aux marchés publics de spécifier la contribution durable de ces technologies. Il permettra aussi aux acheteurs publics de refuser des offres majoritairement composées de produits pour lesquels il n’y pas de réciprocité avec l’UE.