Maître d’ouvrage, entreprise de travaux… l’architecte peut cumuler plusieurs activités économiques de nature différente pour l’opération dont il réalise la maîtrise d’oeuvre, en informant son conseil régional de l’Ordre des architectes, ses clients et la MAF. Toutefois, ces situations sont plus risquées et nécessitent, pour les adhérents, la souscription d’un avenant spécifique pour obtenir la garantie de la MAF.
« L’architecte multicasquettes exerce une activité plus risquée », Entretien avec Michel Klein, directeur général adjoint de la MAF

La MAF constate que certains de ses adhérents exercent leur activité d’architecte pour des opérations dans lesquelles ils sont également maître d’ouvrage, et/ou parfois même entreprise de travaux. En quoi ces situations sont-elles problématiques vis-à-vis de la responsabilité et de l’assurance construction ?

Rappelons que l’activité d’architecte s’exerce dans le cadre d’une profession réglementée dans laquelle le professionnel ne peut pas faire n’importe quoi !

Ces situations présentent une difficulté majeure au regard de l’assurance professionnelle : dans ces cas de figures l’architecte n’est pas un maître d’ouvrage ou un entrepreneur ordinaire.

Il est un sachant qui par ce biais peut être amené, en cas de difficultés, à rechercher sa propre responsabilité de maître d’oeuvre.

Or, dans la pratique, cette mise en cause par lui-même de sa propre responsabilité est difficile à imaginer. Cette situation aggrave le risque : si l’architecte ne peut pas se mettre en cause lui-même, il pourra être appelé en garantie par un tiers (voisin, entreprise, acquéreur en cas de revente de l’opération…) à la fois comme architecte, mais également comme maître d’ouvrage ou entreprise selon les cas.

L’architecte également maître d’ouvrage ou entreprise de travaux doit déclarer sa situation à la MAF.

Dans ce contexte, la MAF constate que dans certaines situations la responsabilité de l’architecte peut être recherchée lors de la réalisation de sa propre maison ou, par exemple, lors de la construction d’un immeuble par une entreprise dans laquelle il détient des parts d’intérêt compliquant ainsi l’imputabilité des responsabilités. C’est la raison pour laquelle ces opérations doivent faire l’objet d’une déclaration de l’adhérent multicasquettes et d’un accord préalable de la MAF pour entrer dans le champ d’application de sa garantie.

En quoi consiste précisément cet accord préalable ?

Ces opérations spécifiques doivent faire l’objet d’une extension du champ d’application de la garantie accordée par la MAF préalablement au lancement de l’opération. Elle peut être obtenue par le biais d’avenants au contrat d’assurance. Ces clauses complémentaires n’entraînent pas de surcoût mais comportent des exclusions de catégories de réclamations, de désordres et de litiges.

Il s’agit d’exclure tous les cas d’enrichissement sans cause et de rappeler à l’adhérent certaines obligations d’assurance pour ses autres activités : l’assurance Dommages-ouvrage lorsqu’il est promoteur et l’assurance décennale lorsqu’il est réalisateur de travaux.

Quels cas de figure abusifs connus de la MAF illustrent ces exclusions ?

Les cas sont assez variés : c’est par exemple l’architecte gérant de l’entreprise de travaux qui surestime volontairement avec sa casquette d’architecte l’état d’avancement du chantier dans sa vérification, met en liquidation l’entreprise qui a été trop payée et demande à son assureur d’indemniser le maître d’ouvrage.

C’est aussi l’architecte qui ne prescrit pas de cuvelage pour la maison qu’il construit pour lui et qui cherche à en obtenir le financement par le biais d’une réclamation adressée à son assureur ; c’est encore l’architecte maître d’ouvrage qui réalise les travaux en autoconstruction, c’est- à-dire sans entreprise, cumulant ainsi tous les risques.

Il s’agit ici d’économies injustifiées et de prise délibérée de risques supprimant l’aléa indispensable au fonctionnement du contrat d’assurance. L’adhérent ne doit pas chercher à obtenir par son assureur le paiement de travaux non réalisés et pourtant indispensables. Ce n’est pas à la collectivité des architectes de payer les parties d’ouvrage non réalisées volontairement.

Quelles sont précisément les opérations concernées ?

Il s’agit d’opérations où l’architecte ne se limite pas à son activité de concepteur de bâtiment. Ce sont les cas dans lesquels, outre sa qualité de maître d’oeuvre, l’architecte a, de quelque manière que ce soit, celle de maître d’ouvrage : propriétaire, copropriétaire, promoteur, gérant ou associé d’une société civile immobilière, constructeur-vendeur…

Et ce sont aussi les cas dans lesquels, au-delà de l’activité de maître d’oeuvre, l’architecte participe à la réalisation matérielle des travaux : contractant-général, architecte, bâtisseur, détenteur de parts d’intérêt dans une société de construction…

Dans les faits, le cas le plus courant est celui de l’architecte également maître d’ouvrage.

Comment la MAF peut-elle être informée de ces cas particuliers ?

Conformément aux conditions générales du contrat d’assurance des responsabilités professionnelles, ces opérations doivent faire l’objet d’une extension de garantie. L’architecte doit donc déclarer à la MAF ces cas particuliers. Cette démarche d’information doit également être faite auprès de son client et de l’Ordre des architectes.

L’architecte qui a, par exemple, des parts d’intérêt dans la société de promotion de l’opération dont il assume la maîtrise d’oeuvre informe obligatoirement les acquéreurs de cette double casquette ; il communique également ces informations à la MAF et à son instance ordinale.

D’une façon générale, l’architecte multicasquettes doit être transparent vis-à-vis de ses partenaires : il fournit à la MAF les attestations d’assurance de maîtrise d’ouvrage (Dommages-ouvrage) et d’entreprise de travaux (responsabilité civile et décennale notamment) selon la nature des activités qu’il exerce.

Le cas le plus courant est celui de l’architecte également maître d’ouvrage.

Comment la MAF interviendra-telle en cas de sinistre ?

En règle générale, face à un sinistre l’architecte-maître d’ouvrage sera amené à saisir l’assureur Dommages-ouvrage ou à mettre en cause les entreprises en sa qualité de maître d’ouvrage.

Dans ce contexte, il pourra faire à son tour l’objet d’un appel en garantie en sa qualité d’architecte de l’opération.

La MAF interviendra dans sa défense pour sa seule qualité d’architecte en mettant en cause les parties et assureurs potentiellement concernés par le sinistre.

Dans le cas où l’architecte est également dirigeant de l’entreprise, la mise en cause de celle-ci et de son assureur devra être envisagée selon le type de sinistre déclaré.

La MAF sera amenée à prendre en charge les condamnations dues aux seules responsabilités imputables à la qualité d’architecte et ne constituant pas une prise de risque délibérée ou un enrichissement sans cause.

 

Pour en savoir plus...

 

  • Articles 12 et 13 du Code de déontologie des architectes (Journal officiel du 25 mars 1980 et rectificatif J.O.– N.C. du 21 juin 1980) : en suivant ce lien ;
  • Articles 2.1 et 2.2 de l’annexe de votre « Contrat d’assurance MAF des architectes – assurance des responsabilités professionnelles » ;
  • Fiche « Les missions permettant de diversifier l’activité d’un architecte » établie par l’Ordre des architectes : en suivant ce lien ;
  • « Foire aux questions : trouvez les réponses à vos questions », de l’Ordre des architectes d’Île-de-France, rubrique Déontologie hors litiges : « Je suis architecte. Puis-je cumuler mon exercice avec une activité commerciale ? Puis-je détenir des parts dans une société de construction ? » À consulter en suivant ce lien.